Fanm nan vodou

Le statut de la femme dans le vodou

Reléguée en position subalterne dans les grandes religions monothéistes (Christianisme, Islam), la figure féminine n’a pas accès aux mêmes fonctions que le sujet masculin dans la hiérarchie de ces institutions religieuses. Il est tout autrement dans le vodou haïtien où elle partage les mêmes responsabilités que son homologue masculin. Hommes et femmes sont complétement égalitaires à savoir que le plus haut poste dans le vodou (manbo, prêtresse vodou) est occupé par une femme ou par un homme (hougan, prêtre vodou).

Ce travail cherche à attirer l’attention sur le rôle de la femme dans le panthéon du vodou, dans la vie des confréries vodouisantes, dans les cérémonies, dans le système de fonctionnement interne, dans les consultations, les lakou (lieu sacré du vodou), le rituel, dans les rara (manifestations culturelles) et autres lieux en dehors des centres du vodou, ou dans l’espace public en général.

La situation actuelle en Haïti est marquée par une faible présence des femmes dans l’espace public (trois femmes seulement ont été élues sur 130 parlementaires dans la dernière législature, pour ne citer que cet exemple).

Le statut des femmes dans le vodou a un caractère exceptionnel, dans la mesure où l’on observe très peu des pratiques de discriminations de genre à l’intérieur du système vodou. Peut-être même que cela représente un caractère exemplaire, car la majorité des religions en compétition sur le terrain en Haïti pratiquent une hiérarchisation des rapports homme-femme et donc maintiennent des pratiques patriarcales. Par exemple, il y a des églises où sans un mariage officiel, une femme ne pourra pas accéder à un poste à responsabilité au sein de la communauté, et dans tous les cas ne sera jamais au sommet de la pyramide hiérarchique. Au quotidien, les vodouisant-e-s cultivent une relation personnelle avec les Loas (esprit) à travers des dons d'offrandes, la création d'autels personnels et d'objets de dévotion et la participation à des cérémonies élaborées de musique, de danse, de possession spirituelle et d’entre-aide.

Vivant en Haïti depuis 2015, je me suis rendue dans un certain nombre de cérémonies et activités vodous qui m’ont permis de me familiariser avec cette religion. Grâce à cela, j’ai pu m’intéresser de plus prêt au statut de la femme dans le Vodou et l’importance de son rôle de potomitan (point central dans la société). Ce travail documentaire m’a également donné l’opportunité d’être impressionnée, au-delà des cérémonies traditionnelles, par la place de l’environnement, de l’humain, du cycle de la vie, du vivre-ensemble dans le Vodou. De l’importance d’être connecté à la terre et à ses ancêtres, aux traditions.

Ce projet photographique fera l’objet d’un livre en collaboration avec Laënnec Hurbon, sociologue et directeur de recherche au CNRS.

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Ce projet a fait l'objet d'une exposition dans le cadre des Visas de l'ANi 2023 (Association Nationale des Iconographes) à la galerie Signatures (Paris) du 22 mars au 2 avril 2023.